La cessation des paiements
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Dossier : La cessation des paiements
Partie 1 La notion de cessation des paiements | Partie 2 La déclaration de cessation des paiements | Partie 3 Constatation judiciaire de la cessation des paiements |
Partie 3
Constatation judiciaire de la cessation des paiements
Après examen de la situation de l'entreprise dont il est saisi, le tribunal constate, par jugement, l'absence de cessation des paiements ou, au contraire, sa réalité. Dans ce cas, le jugement doit être suffisamment motivé car ses effets sont importants.
Préalables au jugement d'ouverture
Le tribunal prononce l'ouverture d'une procédure collective quelle qu'elle soit, de redressement ou de liquidation judiciaire, après avoir vérifié, au jour où il statue, que l'état de cessation des paiements est effectivement caractérisé et que l'entreprise concernée se trouve ainsi dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
A cet effet, le tribunal s'informe des données comptables et financières de l'entreprise, avant toutes autres recherches sur le respect des conditions de forme de sa saisine et des motifs de fond spécifiques à l'ouverture de la procédure demandée.
Il le fait après avoir entendu l'entreprise concernée ainsi que toute personne dont l'audition peut être utile ou le cas échéant, obligatoire, notamment le procureur de la République, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, le représentant de l'ordre professionnel ou l'autorité compétente dont relève l'entreprise, en cas d'activité réglementée.
Il peut compléter ses auditions par une enquête.
Contenu du jugement d'ouverture eu égard spécialement à la cessation des paiements
S'il estime que l'entreprise n'est pas en cessation des paiements, le tribunal rend un jugement de rejet pur et simple de la demande d'ouverture de redressement ou de liquidation judiciaire.
Dans le cas contraire, le tribunal doit prononcer, par jugement, soit le redressement judiciaire, soit la liquidation judiciaire immédiate si le redressement est manifestement impossible.
Quoiqu'il en soit, par le même jugement, le tribunal doit :
- d'une part, suffisamment motiver la caractérisation de la cessation des paiements par la constatation que, au jour où il statue, l'entreprise concernée se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ;
- d'autre part, déterminer la date de survenue de la cessation des paiements, sans que, en principe, celle-ci soit antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure. La fixation de cette date par le jugement est importante car elle est indispensable au tribunal pour déterminer la période dite « suspecte ». La période suspecte est le laps de temps entre la date de survenue de la cessation des paiements et le jour du jugement d'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. C'est la période durant laquelle certains types d'actes, commis par le dirigeant (généralement des fautes de gestion) ou parfois par des tiers, peuvent être identifiés comme nuls de plein droit (c'est-à-dire automatiquement considérés comme n'ayant produit aucun effet, et remettant les personnes concernées par ces actes dans la situation où elles se trouvaient avant que ceux-ci existent) ou comme susceptibles d'être annulés (dès lors qu'une demande en justice est faite en ce sens et acceptée par décision judiciaire). A défaut de figurer au jugement, la date de cessation des paiements est réputée intervenue à la date du jugement d'ouverture.
Bon à savoir : Le jugement fixe cette date à titre provisoire, car elle peut être, ultérieurement, plusieurs fois modifiée à l'intérieur du délai de dix-huit mois, par jugements successifs rendus suite à assignations (exclusivement de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du liquidateur ou du ministère public) dès lors que celles-ci sont lancées dans l'année suivant le jugement d'ouverture.
Effets du jugement, l'identification de la période suspecte et ses possibles conséquences
Pour valablement ouvrir la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire de l'entreprise, le jugement doit constater, notamment, la cessation des paiements et dater la survenance de cet événement en amont du jour de son prononcé, sans pouvoir remonter à plus de dix-huit mois avant lui.
Cette datation permet de délimiter une période spécifique, dite « suspecte », pendant laquelle peuvent être plus aisément circonscrits et identifiés d'éventuels actes anormaux commis par le dirigeant ou parfois par des tiers.
De ce fait, la déclaration de cessation des paiements peut conduire, s'il y a lieu :
- à reconstituer tout ou partie de l'actif de l'entreprise, par suite de l'annulation d'éventuels actes anormaux commis pendant ladite période par son dirigeant ou parfois par des tiers et/ou par suite de la condamnation de ceux-ci à des dommages-intérêts en réparation de ces actes. Il se peut, en effet, que durant la « période suspecte », certains types d'actes, d'apparence anormale ou inhabituelle, aient été commis par le dirigeant (généralement des fautes de gestion) ou parfois par des tiers vis-à-vis de l'entreprise. Du seul fait de leur survenance pendant cette phase, ils sont présumés, les uns, comme nuls de plein droit (c'est-à-dire automatiquement constatés comme tels par le tribunal sans que ce dernier n'ait le moindre pouvoir d'appréciation) ou, les autres, comme entachés de nullité facultative (c'est-à-dire susceptibles d'être annulés après appréciation favorable du tribunal). C'est pourquoi, la loi a prévu la possibilité de remettre en cause ces actes par l'exercice d'actions judiciaires en nullités. Ces remises en cause sont exclusivement réservées à l'administrateur judiciaire, au mandataire judiciaire, au liquidateur, au commissaire à l'exécution du plan de redressement et au ministère public.
- à écarter le dirigeant, auteur de ces actes, de l'entreprise et, parfois, de la vie économique. Il se peut, en effet, que ce type de sanctions judiciaires soient prononcées s'il est établi que, durant la « période suspecte », le dirigeant n'a tenu aucun compte de la survenance de la cessation des paiements dans l'exercice de la direction et de la gestion de l'entreprise et/ou a commis certains actes répréhensibles.
Les exemples suivants permettent d'illustrer plus précisément ces comportements et ces sanctions :
- le fait pour un dirigeant d'avoir employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds, afin de retarder l'état de cessation des paiements et donc l'ouverture de la procédure, l'expose à une condamnation pénale pour délit de banqueroute ;
- le fait pour un dirigeant d'avoir payé pendant cette période un créancier au préjudice de tous les autres, l'expose au prononcé d'une faillite personnelle, sanction judiciaire constituée par un bloc d'interdictions et de déchéances, dont l'interdiction de gérer et la déchéance électorale ne sont que des exemples ;
- le fait pour un dirigeant d'avoir défailli à l'obligation de déclarer la cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours à compter de son apparition, l'expose à une éventuelle interdiction de gérer (sauf s'il a déjà demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation dans le délai de quarante-cinq jours) ;
- le fait pour un dirigeant d'avoir commis une ou plusieurs fautes de gestion, dont les actes précités ne sont que des exemples, l'expose à une action en insuffisance d'actif et à la condamnation au comblement de passif pouvant en résulter.